samedi 2 mars 2019

pastiches | 1


Photo Philippe Marc


Écrire, écrit-elle. Écrire, les étriers aux pieds. Écrire, écrier, encrier. Pourquoi écrire en fuyant à cloche-pied ? Encre-toi et ancre-toi avec un « A ». Écrire ancre-toi, les pieds sous la table de la cuisine, la cuisine à écrire, la cuisine ancrée au centre de la maison, la maison au centre du monde, de ton monde. 

Écrire pour ne plus s’entendre parler aux autres. Écrire pour ne plus s’entendre parler aux autres. Écrire pour le silence à l’entour de tes entours, pour déverser le trop-plein qui déborde et qui ne sait. 

Écrire sur des cahiers et raturer rageusement – bleu le cahier à ratures – écrire sur de beaux carnets moleskine et recopier les mots de Virginia ou Marguerite – noir le carnet moleskine – écrire sur le cahier violet clairefontaine des choses qui ne sont que de ta nuit, les rêves au petit matin qui bougent et crient encore un peu, écrire ce que la nuit t’a transmis – avec le deuxième café noir – écrire pour te faire jour, écrire avant d’écrire. 

[interruption travail alimentaire]

Enfin, parfois, pas toujours, hélas, cependant, écrire enfin, écrit-elle, sur le clavier. Écrire, dit-elle, en lisant ce qui s’écrit sur l’écran. Mettre la nuit au propre pour les autres. Mettre la nuit dans de beaux draps. Écrire en creusant la langue, en éliminant le superflu, le gras et les adjectifs. Écrire peut-être écrire. 


Texte: Christine Zottele
Image: Philippe Marc