Au travers de
l’avenue
on a érigé des barricades
On peut désirer
tuer l’autre
lorsque l’on a fermé toute rencontre de
parole
on se retranche langue contre langue
on creuse dans l’obscurité
on se retranche dans sa langue
on est de chaque côté du câble d’acier tendu au travers de l’avenue
l’écrou tourne un tour de plus une pince pour serrer un peu
plus
le métal devient rouge
de tant de tension
sous l’action de la chaleur ça dilate
légère déviation d’atomes
dans la matière
le métal pourrait peut-être chanter
fil de guimbarde au son magnétique
les champs s’affolent dans le métal des champs s’ouvrent les champs magnétiques du métal
le fil tend jusqu’à céder il aspire deux
volumes d’air encore
les mots tombent peu à peu peaux mortes du réel
le soleil fait couler les briques
celles qui érigent le mur
pourrait-on malaxer les briques ?
le fil de métal s’amenuit jusqu’à disparaître
matière solide instable
frontière dans l’air
deux volumes gazeux
y a-t-il plus de vide dans le vide de
l’air que dans le vide du métal ?
le vide attend sa part
le sang attend sa part
je vois le fil de métal qui se tend en travers de la route
la mort chante le long du câble
il y avait deux camps
deux langues
un fil de métal entre les deux camps
cela aurait pu être un mot ou une déflagration de
boulons et de sang
je sais la gorge sectionnée
décollation de la tête par le métal
et les briques continuent de couler le
long de l’écorce des oliviers
une matière épaisse couvre l’herbe
le fil de métal suit les cimetières et la mort
alors on devient autre chose
le fil de métal a fait son sale boulot
là-dessous les
solides redeviennent liquides
la matière bouge lentement
on se sépare de soi
on coule aussi un peu
l’osselet de la cervicale sectionnée demeure un peu
puis se sépare
solide ou gazeux
qui saura le chemin de la cervicale
sectionnée ?
et si j’arrache une fleur
c’est peut-être un bout de l’osselet un sourcil une joue un doigt
dans le pétale orange de la capucine entre mes
mains
cela met du temps à repousser
bouture après bouture
le corps solide se désagrège
le fil de la tisseuse
insécable fil rougi
presque liquide de tant de cris
fil brûlé de métal incandescent
insécable fil du
pétale de la
capucine coupée.
Texte: Delphine Eyraud
J'en frissonne encore... en même temps ta voix dans la douceur de l'air, je me souviens... merci Delphine
RépondreSupprimerJ'ai suivi tes mots dans ce monde d'éléments, trouvant l’abîme et la fleur cote à cote. Au même endroit, Merci
RépondreSupprimerMagnifique!
RépondreSupprimer