Semaine
de peu. De peu de pas. Pleine de ne pas. De peu de neige (à peine quelques
flocons mardi dernier) De peu de mots.
Pourtant, deux soirées théâtre : Vagues souvenirs de l’année de la peste de Lagarce –mon cher
Lagarce - et Femme non-rééducable de Stefano
Massini ne m’ont pas vraiment réveillée. Sinon cette phrase prononcée par Anna
Politkovskaïa que je ne retrouve pas.
En
vrac, avec les élèves, Les Misérables,
L’Odyssée et les fabliaux du Moyen
Âge. Des cours de grammaire aussi. Jawed qui s’endormait pendant le cours sur
la voix passive, m’invectivant brusquement : pourquoi toujours les islamistes ?
Pourquoi pas les Chinois ou les Yakuzas ? Parce je ne suis pas sûre de
savoir orthographier yakuza. Esquive
qui semble le satisfaire momentanément. J’efface l’exemple au tableau et
inscris : Deux touristes ont été
enlevés par un groupe de Yakuzas. La jambe de Jawed violemment agitée d’un
mouvement ininterrompu, le soir pour la dernière réunion parents-profs ; à
côté, le silence hostile de son beau-père. Un masque froid et en colère auquel
je fais face avec l’un de mes sourires les plus désarmants. À peine un mois que
je connais Jawed, aisance, vocabulaire et maturité à l’oral mais c’est le
passage à l’écrit qui pose problème. Le beau-père acquiesce, raconte l’enfant
précoce, l’incapacité du collège public à répondre à leurs attentes, l’ennui de
Jawed en cours, l’exclusion, le passage dans le privé s’achevant par une
bagarre et une dernière exclusion. Un peu avant Noël. Il aimerait que ça ne
recommence pas, qu’on ne laisse pas les choses s’envenimer, qu’on soit
vigilant. Poignée de main de fer. Jawed me sourit. J’ai réussi l’examen au
moins avec l’un d’entre eux. Sortir du collège en colère, sans savoir pourquoi.
Colère montant avec correction des copies des élèves. Jamais ils n’auront leur
CAP d’ajusteur de mots. Quel que soit le niveau… tout ce que je croyais acquis…
à qui ? à quoi ? à qui la faute ? à quoi bon continuer ?
J’arrête de corriger, je ne décolère pas. Je vais marcher pour me calmer. Seule
avec le chien.
En
vrac, je suis. Humeur et temps instables. Froid, pluie, vent, neige. J’emprunte
le chemin habituel à l’envers. Ne reconnais plus rien. Déstabilisée par cet
envers du familier, par l’absence de lumière, l’inquiétude que suscite
l’inconnu, et ce vent de colère en accord avec l’agitation intérieure. Du coup,
ça me calme. L’euphorie me gagne. M’amuse au jeu un peu vain du dernier
survivant parcourant ce qui reste de la nature au milieu des éléments
déchaînés. J’avance vers le nord. À l’est tout est bouché. À l’ouest une lueur.
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