Je pars en même temps que le Moscou-Paris à 7h10 d’Aix-TGV.
Trois jours de froid bleu canard avec l’amie à Paris. Elle a tout organisé,
tout réservé y compris ce qui ne se réserve pas. J’arrive la première. [JacquesBonsergent est le premier résistant fusillé pendant l’occupation allemande. La
station de métro qui porte son nom est sur la ligne 5] Deux bouquets de
jonquilles pour mettre du jaune à la vie. À l’hôtel, rue Sampaix [ Lucien
Sampaix, journaliste et communiste fusillé le 15 décembre 1941 par les nazis]on
offre les bouquets à Ahmed et Pétronelle, la chambre s’ouvre grâce à leurs
sourires.
Bagages déposés, repartir vers le canal Saint-Martin, rue Dieu - espérer croiser Dominique Hasselmann. Soupe au potiron et au gingembre rue des Vinaigriers. Rue d’Aboukir. L’amie chantonne un couplet d’ « Aquarelle » d’Isabelle Mayereau.
Bagages déposés, repartir vers le canal Saint-Martin, rue Dieu - espérer croiser Dominique Hasselmann. Soupe au potiron et au gingembre rue des Vinaigriers. Rue d’Aboukir. L’amie chantonne un couplet d’ « Aquarelle » d’Isabelle Mayereau.
Le temps était maussade, à la fois gris et froid
Les boulevards encombrés et les néons géants
De la rue d’Aboukir attaquaient les passants
Comme un fusil à eau sur le nez d’un agent
Froid oui, mais ni maussade ni gris. Ni bleu, ni blanc.
Comme le bonnet à pompon de l’amie qui tombait souvent. Quant à moi, tête nue
tête folle, toute la journée cherche à acheter un bonnet, en vain ! Nous
cherchons « la lumière moderne de l’insolite » dans les passages.
La lumière de l’insolite, voilà désormais ce qui va le
retenir.
Elle règne bizarrement dans
ces sortes de galeries couvertes qui sont nombreuses à Paris aux alentours des
grands boulevards et que l’on nomme d’une façon troublante des passages, comme si dans ces couloirs dérobés au jour, il
n’était permis à personne de s’arrêter plus d’un instant. Lueur glauque, an
quelque manière abyssale, qui tient de la clarté soudaine sous une jupe qu’on
relève d’une jambe qui se découvre. Le grand instinct américain, importé dans
la capitale par un préfet du second Empire, qui tend à recouper au cordeau le
plan de Paris, va bientôt rendre impossible le maintien de ces aquariums humains déjà morts à leur vie primitive, et qui méritent pourtant
d’être regardés comme les recéleurs de plusieurs mythes modernes, car c’est
aujourd’hui seulement que la pioche les menace, qu’ils sont effectivement
devenus le paysage fantomatique des plaisirs
et des professions maudites, incompréhensibles hier et que demain ne connaîtra
jamais.[1]
Passage du Caire, des êtres vaguement familiers et étranges
et inquiétants en promotion : des sans-bras ou des sans-tête, des
créatures sans âge, asexuées, argentées, à 59 euros, pour certains… J’hésite à
en acheter un mais finalement y renonce - trop encombrant dans le train…
L’amie m’entraîne vers un autre passage, celui du Grand-Cerf, les plus hautes verrières de Paris, de belles enseignes libellules ou yeux à lunettes, passage du Bourg-l’abbé, triste et endormi… nous marchons dans le Moscou-Paris, nous abreuvant de thé ou de café dans des haltes prévues à cet effet, nous remettons en marche – court pèlerinage rue du Jour, à la droguerie où l’amie se procurait plumes et perles pour ses oreilles. Le soir, retrouvons la troisième amie et le fils après leur journée de travail.
L’amie m’entraîne vers un autre passage, celui du Grand-Cerf, les plus hautes verrières de Paris, de belles enseignes libellules ou yeux à lunettes, passage du Bourg-l’abbé, triste et endormi… nous marchons dans le Moscou-Paris, nous abreuvant de thé ou de café dans des haltes prévues à cet effet, nous remettons en marche – court pèlerinage rue du Jour, à la droguerie où l’amie se procurait plumes et perles pour ses oreilles. Le soir, retrouvons la troisième amie et le fils après leur journée de travail.
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