samedi 27 juillet 2013

dans cet endroit-là




laisse-moi te raconter cet endroit-là. Plus qu’un endroit-là c’est un décor. Un décor affichant son artifice. De faux espaces verts où le vert est rasé de près. Rien ne dépasse d’aucune haie, d’aucune zone de golf. C’est au cordeau. Pour ce faire, il y a des hommes en jaune avec des véhicules verts qui se lèvent tôt pour ceux qui dorment encore. Ça ressemble un peu au village de la série « Le Prisonnier ». À sept heures ce matin, à trois mille pas de la maison de vacances, je les ai vus. Je n’ai rencontré que des jardiniers-coiffeurs de pelouse de golf et des cantonniers des plages. Je n’ai pas vu un chat à « la plage des chats ». Les pancartes rouges interdisant formellement de nourrir les chats errants – assimilés aux rats véhiculant des maladies – ont fini par décourager les nourrisseurs. À Noël, j’avais été surprise par le nombre de chats – force numéraire faisant loi, ils terrorisaient les chiens au bout des laisses des promeneurs. Où sont allés les chats louches, les rouquins borgnes et autres félins marins au poil hérissé ? Sur la digue, à l’endroit où la rivière se coule dans la mer, trois pêcheurs pêchaient debout. Sur la première plage – « la plage aux chats » où la baignade n’est pas surveillée – un couple de retraités en retrait du bord marchaient de l’eau jusqu’aux cuisses. J’ai plongé, nagé au-delà des bouées, allongé mon corps en planche. De salut et non planche vermoulue. J’ai regardé le ciel. Il disait vrai. Il disait beau le ciel. Retour vers la plage encore presque déserte. Retour à cet endroit-là.


Dans cet endroit-là, les villas ont des airs d’haciendas de Don Diego de la Vega avec quelques excentricités burlesques : ainsi au lieu des lions majestueux surmontant les piliers des portails, on trouve des caniches tout aussi prétentieux mais nettement moins majestueux. Dans cet endroit-là, il y a un drôle de château qui ne fait pas vrai. Difficile de lui donner un style. C’est un château maritime attaqué par des sirènes alpinistes.
Dans cet endroit-là, on remarque aussi une densité importante de panneaux d’interdiction au mètre carré. Il serait plus simple de rappeler ce qui est autorisé : Il est permis de regarder le ciel…



toutes les photos ont été prises entre le 19 et le 21 juillet par l'auteure



1 commentaire:

  1. D 3 Belle promenade solitaire ou j'aurais bien aimé m'immiscer ! (en oubliant tous les "ne pas ")

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